Par Héloïse Fougeray
Mis à jour le 24 juillet 2025

Statuts pour profession libérale : comparatif EI, SCP, SELARL, SELAS

Quand on exerce une profession libérale, choisir la bonne structure juridique est une décision aussi stratégique que personnelle. EI, SCP, SEL… les options ne manquent pas, mais chacune présente des règles, contraintes et opportunités différentes. Ce choix aura un impact direct sur vos revenus, votre protection sociale, votre responsabilité ou encore vos possibilités de vous associer à d’autres.

Dans cet article, nous vous guidons à travers les formes juridiques les plus courantes en 2025. L’objectif ? Vous permettre de prendre une décision éclairée, selon votre activité, vos besoins et vos ambitions.

Qu’est-ce qu’une profession libérale ?

Les professions libérales englobent une grande diversité de métiers exercés de manière indépendante. Ce qui les unit, c’est la nature intellectuelle, technique ou de soins de leur activité, toujours réalisée sous leur propre responsabilité.

On distingue deux grandes familles :

  • Les professions réglementées (souvent rattachées à un ordre professionnel) comme les notaires, avocats, experts-comptables ou vétérinaires, qui doivent suivre des règles strictes d’exercice.
  • Les professions non réglementées, comme les sophrologues, les consultants ou les naturopathes, qui jouissent d’une liberté plus grande, y compris dans le choix de leur statut juridique.

Pourquoi comprendre cette distinction est important ? Parce qu’elle conditionne les structures juridiques possibles. Un avocat, par exemple, ne pourra pas exercer librement en SASU comme le ferait un coach. Mieux vaut donc connaître ses obligations avant de se lancer.

Les principales structures juridiques pour exercer en profession libérale

L'entreprise individuelle (EI) : pour exercer seul, simplement

Vous démarrez votre activité seul(e) ? L’entreprise individuelle (EI) est souvent la première forme juridique choisie. C’est la structure la plus simple pour se lancer : peu de formalités, une comptabilité allégée et une fiscalité par défaut à l’impôt sur le revenu (IR). Depuis 2022, elle protège automatiquement votre patrimoine personnel, ce qui représente une vraie avancée.

Mais attention : vous exercez en votre nom propre. Cela signifie qu’il n’y a pas de personnalité morale distincte, ce qui limite les possibilités d’association ou de cession. Et même si vous pouvez opter pour l’impôt sur les sociétés (IS), les leviers d’optimisation restent limités.

L’EI convient bien aux activités libérales individuelles et à ceux qui veulent démarrer leur activité simplement.

La Société Civile Professionnelle (SCP) : l'exercice collectif traditionnel

La SCP est l’une des plus anciennes formes sociétaires utilisées au sein des professions libérales réglementées. Vous êtes plusieurs à exercer ensemble, vous partagez les recettes, les charges… mais aussi les responsabilités. Car ici, la responsabilité est illimitée et solidaire : si l’un des associés fait défaut, les autres doivent couvrir.

Ce cadre civil est fiscalement transparent (IR par défaut), mais commence à montrer ses limites. Rigidité dans la gestion, solidarité risquée, difficulté à faire entrer un nouvel associé, etc.

On la retrouve encore chez les notaires ou les avocats. Mais ce statut est de plus en plus remplacée par les SEL, beaucoup plus protectrices.

Sociétés d’Exercice Libéral (SEL) : un cadre moderne et souple

Créées pour moderniser l’exercice en commun des professions réglementées, les SEL reprennent les formes commerciales classiques (SARL, SAS, SA) tout en conservant un objet civil. Résultat : vous exercez dans un cadre connu (responsabilité limitée, gouvernance souple) et respectez votre déontologie professionnelle.

On distingue trois grands types :

  • SELARL (équivalent de la SARL) : pour une gestion encadrée,
  • SELAS (équivalent de la SAS) : très flexible, idéale pour organiser librement le capital, les pouvoirs, les droits de vote,
  • SELAFA (inspirée de la SA) : rare, réservée aux cabinets d’envergure.

Chaque forme existe aussi en version unipersonnelle (SELARLU, SELASU).

Depuis 2024, la part de rémunération technique est imposée en BNC, même si la société est soumise à l’IS. Et selon la forme choisie, vous serez affilié soit au régime TNS (gérant de SELARL), soit assimilé salarié (président de SELAS).

Les SEL offrent une réelle protection du patrimoine (responsabilité limitée aux apports), de la souplesse et permettent d’attirer des associés. Attention cependant : la mise en place est plus formelle (statuts, ordre professionnel, annonces légales) et la gestion plus exigeante.

Bon à savoir :

Les associés de SEL restent responsables de leurs actes professionnels. La limitation de responsabilité ne vaut que pour les dettes sociales.

Tableau comparatif des formes juridiques : EI, SCP, SEL, SCM, SISA...

Quelle que soit votre profession libérale, le choix du bon statut est important. Ce tableau vous permet de comparer rapidement les formes juridiques selon vos objectifs : niveau de responsabilité, fiscalité, flexibilité et usages courants.

Structure

Type de société

Responsabilité des associés

Fiscalité par défaut

Gouvernance

Professions concernées

Finalité / Usage

EI

Entreprise individuelle

Illimitée (responsabilité professionnelle seulement depuis 2022)

IR ou option IS

Très simple

Toutes, surtout non réglementées ou en début d’activité

Exercice en solo, simplicité administrative

SCP

Société civile

Illimitée et solidaire

IR ou option IS

Peu souple

Professions libérales réglementées (avocats, notaires, médecins...)

Exercice en commun avec partage des recettes

SELARL / SELARLU

Société commerciale (SARL adaptée)

Limitée aux apports

IS

Moyennement souple

Professions libérales réglementées

Exercice structuré seul ou à plusieurs, cadre sécurisant

SELAS / SELASU

Société commerciale (SAS adaptée)

Limitée aux apports

IS

Très souple

Professions libérales réglementées

Flexibilité statutaire, gouvernance personnalisée, exercice seul ou à plusieurs

SELAFA

Société commerciale (SA adaptée)

Limitée aux apports

IS

Complexe

Grands cabinets libéraux

Adaptée aux structures importantes avec de nombreux associés

SCM

Société civile de moyens

Chacun est responsable de ses actes

N/A

Moyennement souple

Toutes, surtout les professions médicales

Mutualisation de moyens, pas d’exercice en commun

SISA

Société interprofessionnelle de soins ambulatoires

Limitée aux apports

IS

Moyennement souple

Professions de santé pluridisciplinaires

Exercice coordonné en maison de santé, structure adaptée aux pratiques pluriprofessionnelles

Et selon votre métier, quelle structure choisir ?

Le choix du statut dépend aussi de votre profession. Les règles ne sont pas les mêmes pour un notaire, un médecin ou un avocat. Voici quelques cas typiques pour y voir plus clair.

Notaires

Le notariat est très encadré. On retrouve encore des SCP, mais de plus en plus d'offices passent en SEL pour sécuriser les responsabilités et faciliter l’intégration d’associés. La transformation en SEL nécessite l’autorisation du Garde des Sceaux et le respect de règles strictes sur la détention du capital.

Médecins

Certains exercent seuls en EI ou SELARLU. Mais beaucoup se regroupent en SCM (pour partager les locaux et le matériel) ou optent pour la SEL, surtout quand l’activité se développe. Ceux qui travaillent en maison de santé peuvent choisir la SISA, une forme hybride adaptée à la pratique pluridisciplinaire.

Avocats

Ils disposent d’un éventail assez large : SCP, SEL, AARPI, SELAS… La SELAS est aujourd’hui plébiscitée, car elle combine responsabilité limitée, flexibilité statutaire et compatibilité avec les règles de la profession.

Faire évoluer sa structure : pourquoi passer en SEL ?

Nombreux sont les professionnels qui commencent en entreprise individuelle ou en SCP, puis envisagent une transformation en SEL. Pourquoi ? Parce que cette évolution permet de :

  • Limiter votre responsabilité personnelle,
  • Optimiser votre rémunération (via salaires + dividendes),
  • Préparer une transmission,
  • Ou encore accueillir de nouveaux associés ou investisseurs (surtout en SELAS).

Côté fiscalité, si vous apportez votre activité à une SEL, vous pouvez bénéficier du sursis d’imposition prévu par l’article 151 octies du CGI. Attention : ce dispositif impose de conserver les titres reçus pendant au moins trois ans pour éviter l’imposition immédiate.

Cette transformation nécessite un minimum de rigueur : évaluation du fonds libéral, rédaction de statuts, validation par l’ordre professionnel, publication d’une annonce légale de constitution.

Bon à savoir :

La transformation d’un cabinet en SEL peut permettre une optimisation de la rémunération du dirigeant. Cela permet de dissocier le salaire (soumis aux cotisations sociales) des dividendes (soumis à la flat tax ou intégrés dans une stratégie patrimoniale). Cette option n’existe pas pour les SCP ou l’entreprise individuelle.

Conclusion

Le choix d’une structure juridique n’est pas anodin : il conditionne votre protection, votre fiscalité et même vos perspectives de développement. Que vous exerciez seul(e) ou à plusieurs, que vous soyez en début de carrière ou en phase de structuration, prenez le temps d’évaluer les avantages et limites de chaque statut.

FAQ sur les formes juridiques pour une activité libérale

Quelle est la forme juridique d'une profession libérale ?

Cela dépend de la profession concernée. Une profession libérale non réglementée peut s'exercer sous forme d'entreprise individuelle, de SASU, d'EURL... Pour les professions réglementées, seules certaines structures sont autorisées (SCP, SEL...).

Quelle est la différence entre une SARL et une SELARL ?

La SELARL reprend la forme de la SARL, mais elle est réservée à l'exercice d'une profession libérale réglementée. Elle obéit à des règles spécifiques de déontologie, de gouvernance et de détention du capital.

Est-ce qu'une SEL est une société civile ou commerciale ?

Une SEL est une société commerciale par sa forme (SARL, SAS, etc.) mais avec un objet civil. Elle permet donc de concilier les avantages des structures commerciales avec les exigences propres aux professions libérales.

Peut-on changer de structure en cours de carrière libérale ?

Oui, cela est tout à fait possible et courant. De nombreux professionnels passent d’un statut simple (comme l’entreprise individuelle ou la SCP) à une SEL pour bénéficier d’une meilleure protection et d’une optimisation fiscale.