Par Matylda Boucher
Mis à jour le 31 octobre 2023

La transmission universelle du patrimoine (TUP), une procédure d'absorption simplifiée

Le droit français prévoit plusieurs voies permettant à une société d'en absorber une autre. La TUP (Transmission Universelle du Patrimoine) en est une. Passons en revue les modalités de cet outil de restructuration qui ne requiert aucune liquidation de la société dissoute. La formalité est simple, mais soumise à condition.

Qu'est-ce qu'une TUP, à qui s'adresse ce moyen de fusion entre deux entreprises ?

Introduite dans le droit français depuis les années 2000, la transmission universelle du patrimoine est un concept juridique relativement récent. Inspirée du droit allemand, cette procédure juridique vise à simplifier la fusion de deux sociétés.

Définition de la TUP

La TUP peut être définie comme un processus légal qui permet à une entreprise (la société absorbante) de faire l'acquisition de tout le patrimoine d'une autre (la société absorbée). En pratique, la TUP est généralement le mode de fusion choisi lorsqu'une société mère souhaite absorber sa filiale dont elle détient toutes les parts sociales ou actions. Qui peut procéder à une TUP ? Deux conditions doivent impérativement être réunies :

  • la société absorbée ne doit posséder qu'un seul associé ;
  • cet associé doit impérativement être une personne morale (SARL, SAS, SASU, EURL ou autre statut juridique).

Dans le cas où l'associé unique de la société absorbée est une personne physique, la TUP est impossible. Il faudra alors s'orienter vers des formalités juridiques alternatives, comme la fusion simplifiée.

Les avantages de la TUP

Le principal avantage de la TUP est qu'il s'agit d'une procédure juridique de fusion légère. Elle s'appuie sur une simple déclaration de dissolution. La société absorbée déclare sa dissolution sans passer par une liquidation judiciaire ou amiable. La nomination d'un commissaire à la fusion ou d'un expert judiciaire n'est pas obligatoire, puisque la société dissoute est absorbée à hauteur de 100 % via une transmission directe de son patrimoine.

Le patrimoine de la société absorbée est transmis à la société absorbante, cela englobe : 

  • l'ensemble des actifs (immobiliers, équipements, brevets et autres) ;
  • le passif de la société absorbée (capital, dettes et créances) ;
  • son bail commercial ;
  • les contrats de travail.

Tous les éléments ne sont pas nécessairement transmissibles d'une société à l'autre. Une transmission universelle du patrimoine peut amener à la révision de certains contrats. Cette exception peut concerner des accords collectifs, des franchises, des licences ou des cautionnements. L'accord du co-contractant est indispensable pour que la collaboration se poursuive. Les contrats de travail doivent quant à eux faire l'objet d'un avenant en cas de modification.

Le régime fiscal de la TUP

En principe, la cessation d'activité d'une entreprise soumise à l'impôt sur les sociétés mène à l'imposition immédiate de ses derniers résultats. Cependant, dans le cadre d'une absorption par une procédure TUP, la société absorbante et la société dissoute peuvent bénéficier du régime fiscal de faveur des fusions. Ce dispositif est réglementé par le l'article 210 du Code général des impôts.

Qu'est-ce que le régime fiscal des faveurs des fusions ? C'est une procédure permettant de différer l'imposition immédiate de la société dissoute. L'objectif est de limiter l'impact fiscal de la TUP pour la société mère. L'équilibre financier de la société absorbante est ainsi préservé. La société absorbante n'est toutefois pas obligée de recourir au régime fiscal de faveur des fusions. Il est optionnel. Pour en bénéficier, une demande doit être formulée auprès de l'administration fiscale.

Comment se déroule une transmission universelle du patrimoine ?

La mise en place d'une transmission universelle du patrimoine est une procédure juridique simple et rapide. L'opération se résume finalement à un simple accord entre deux personnes morales.

1- Rédiger un procès-verbal de dissolution

La décision d'une TUP doit être actée par un procès-verbal de dissolution. Ce document officiel est généralement rédigé lors d'une assemblée générale. Aucune délibération n'est obligatoire dans le cadre d'une TUP entre une société mère et une société fille. La décision peut être prononcée de manière unilatérale par la société absorbante possédant 100 % du capital de la société absorbée.

2- Demander la publication d'une annonce légale

La société absorbée est ensuite tenue de publier une annonce légale TUP de dissolution sans liquidation. Cette publication dans le journal d'annonces légales permet d'officialiser la dissolution et d'en informer de tierces personnes morales ou physiques. Les annonces légales permettent notamment aux créanciers de se manifester pour s'opposer à la dissolution d'une société et demander une régularisation des dettes contractées.

3- Déclarer la modification de l'entreprise

La société absorbée est tenue de déclarer sa cessation d'activité auprès du Registre de Commerce et des Sociétés (RCS) ou du Répertoire des Métiers (RM), qui procédera à sa radiation. Cette formalité peut être réalisée :

  • sur le Guichet unique : www.inpi.fr ;
  • sur Infogreffe : www.infogreffe.fr ;
  • ou encore via le formulaire M2 correspondant au cerfa n° 11682*07.

4- Passer le délai d'opposition des créanciers (1 mois)

Les créanciers ont un délai de 30 jours pour s'opposer à la dissolution de l'entreprise, à compter du jour de la publication de l'annonce légale. Si aucun créancier ne se manifeste dans ce délai, la transmission universelle du patrimoine prend effet au lendemain de son expiration. Dans le cas où il se manifesterait une opposition à la TUP, celle-ci sera traitée par le tribunal compétent. Un juge devra alors rejeter de l'opposition, imposer le remboursement des créances ou demander la mise en place de garanties.

Le cas particulier de la TUP obligatoire

Le régime juridique de la TUP peut être le fait d'une décision volontaire, mais peut aussi être l'effet d'une décision de justice. La TUP peut en effet faire l'objet d'une procédure obligatoire. Cela peut arriver lorsque lorsqu'une entreprise perd l'un de ses associés. Elle se retrouve ainsi en partenariat avec un unique associé détenant tout son capital social. Afin de régulariser la situation, un nouvel associé doit s'intégrer dans l'organisation. Sinon, au bout d'un an, les deux entreprises devront procéder à une TUP obligatoire.

Cette mesure juridique implique qu'une filiale intégrale ne peut être maintenue de façon définitive. Cela permet d'éviter les abus et de protéger les éventuels créanciers de la filiale. Grâce à cette absorption obligatoire de la filiale par la société mère, les créanciers peuvent facilement se retourner contre la société mère pour réclamer le remboursement des dettes contractées par la filiale.